Vous le connaissez ?
Moi non plus.
Et pourtant…
Non non non. Humouw je précise !
Un bonnet sobre. Une barbe qui n’en finit plus de friser. Des yeux noirs et profonds qui ne laissent rien transparaître que ce qui sortira de sa bouche.
Engoncé dans son gilet Échappés, enfoncé dans son fauteuil immense, ou peut-être pas.
Concentré en tout cas. Répondant pourtant à la demande incessante, posté à l’entrée de l’atelier, lui, l’accueil chaleureux et toujours à l’écoute, gardien de l’espace de création du niveau intermédiaire du théâtre pendant 48 longues et interminables heures.
Peut-on sortir ?
As tu une bonne excuse ?
Il faisait froid mais l’air est agité de son souffle, de sa frappe rapide et continue sur le clavier macintosh.
Un sourire timide et le mot sarcastique, indétrônable qui ne paye pas de mine, il semble occuper chaque parcelle de l’atelier et vous surprendra, planté derrière votre épaule, le regard occupé, affairé à une tâche qu’il viendra d’inventer.
Où est-il ? Évadé dans une lecture, dans un imaginaire dans lequel il nous emporte. Il ressort de derrière le paravent, l’instant d’après à l’imprimante, de l’autre côté, un bouquet de feuilles noircit des pensées des auteurs dans ses mains, une question pour un écrivain, un conseil pour un autre, une main posée, malgré tout, sur l’épaule déjà courbée d’un troisième.
Il trouve pourtant le temps de griffonner ses idées chargées de vas-et-viens et de turbulences, des idées dissociées.
Il imprime. Toujours il imprime et observe, il semble voir à travers l’imprimante, il lui parle. Sa meilleure amie ?
Un sourire laisse apparaître ses dents lorsque nous échangeons sur le décor désagrégé de notre antre.
Puis comme une mouche piquée par une idée, il pond une règle nouvellement inventée : “sobriété dans l’atelier. Un thé glacé ? Ça vous pouvez” lorsque je veux entrer avec une bière.
Plein de surprise caustique, de fourberie affirmée, d’humour incompris et de joies déçues, 48 heures avec l’auteur de “4 saisons” constitue une épopée parsemée d’embûches et de sensations fortes.
Par Edouard Lapras