C’est périlleux, je trouve, d’écrire un article sur soi et son confinement sans très vite frôler une légère indécence de romantique quelque peu nombriliste.
Je suis confinée dans un lieu que j’adore, au pied des montagnes. Je dors seule dans un mazot – la Léproserie – et j’ai la liberté de rejoindre ma famille dans son chalet, en passant par le jardin. J’ai désactivé mes notifications. J’occupe mes journées à lire, dormir, faire du yoga, manger des pizzas ou du soja, et dès que sonne 18h, je vais promener le chien et laisse ainsi libre cours à toutes mes introspections mentales, dans le plus grand, ou le pire, des délices.
Voilà, ça c’est la partie qui me tiraille puisque j’ai conscience de ma position. En tant qu’ “artiste”, je ne fais pas partie de ceux qui continuent coûte que coûte, et que j’admire certainement. Ça, ce sont mes copains, mes ami.e.s avec qui je joue, et qui m’embauchent également. Je leur dois beaucoup.
À l’initiative de Jules Meary et Alexandre Virapin, j’ai participé aux « 48 Heureusement ». C’était étrange pour moi car nombreux sont ceux qui connaissent mon (non) amour pour le virtuel, et faire des lectures de cette façon… bon. Et puis, et puis, j’ai été séduite, comme bien souvent. Je me suis enregistrée, j’ai fait des réunions zoom (tant de réunions zoom) j’ai répondu à des coups de fil, et j’ai mis des alarmes sur mon téléphone pour ne pas louper mes rdv live Youtube.
J’ai été honorée de participer à la pièce de Constance de St Remy « D’où vient le nom des roses ». Parfois, pendant les quelques répétitions, je perdais un peu ma concentration, et alors, avantage de la webcam, je coloriais discrètement (je crois) sur mes genoux, ou mangeais du Toblerone en attendant que ce soit mon tour de parler. C’était plutôt étonnant d’être dirigée comme ça, à distance, sur les intentions et les intonations, sans interaction physique… mais nous nous connaissons tellement tou.te.s par coeur que cela s’est fait dans une grande simplicité, et une grande joie surtout, je dois l’avouer.
Mes fenêtres sont ouvertes au moment où j’écris, et mes voisins qui n’arrêtent pas de faire exploser des fusées dans leur jardin viennent de mettre à fond « La jeunesse emmerde le Front National » tout en scandant de leur plus belle voix les Bérurier Noir. Aujourd’hui, ça part en rave party à 17h, et je vote oui.
Autrement, j’ai lu (toujours pendant les « 48 Heureusement ») un extrait du roman « Nul Si Découvert », ce qui me permet de faire une habile transition sur mes projets, comme demandé dans les consignes de l’article. Son auteur, Valérian Guillaume, me met en scène dans le futur spectacle « Richard dans les étoiles » avec la Cie Désirades. J’y joue le rôle de Ralph, un adolescent aux airs je m’en foutiste, mais des plus attachants. Je l’adore. La pièce est prévue pour fin 2021. On verra bien.
2022
C’est plus sérieux.
Autrement, là, tout de suite, s’il n’y avait pas eu de douteuses digestions de pangolins, je serais entrain de répéter avec Laurent Cazanave au Théâtre 14 pour « Je me suis assise et j’ai gobé le temps ». Je serais surement en train de me rouler par terre pour le rôle du bébé, et regarderais mes partenaires que je n’ai pas eu la chance de tous rencontrer… sauf sur zoom, évidemment, où nous nous sommes dit : « À dans un an ». C’est bien, ça me laisse du temps pour apprendre mon texte.
Enfin, à défaut d’avoir pu jouer « Jean la Chance » de Brecht au théâtre du Sel avec Karin Catala et les Échappés, on se retrouve tou.te.s pour des anniversaires surprises (et oui, oui, tout est possible) des quizz, des apéros, et plein d’autres doux mots. Car, l’amitié, elle, s’infiltre dans tous les supports. Des vêtements choisis, aux marque-pages et photos retrouvés dans les livres mis dans ma valise cette nuit d’avant.
Oui, mes ami.e.s me manquent. Ma famille me manque. Mais j’apprends à apprivoiser cette nouvelle notion du temps et tout ce qui en découle ; et enfin, à l’invitation de Marie-Noëlle, à écrire, moi aussi, mon premier article.